Plume d’Éveil – De l’amitié (1)

Conversation avec un ami

 

Mon ami je t’en prie…

Pour ce que j’ai fait excuse-moi,

Sans le vouloir je t’ai blessé.

Mon ami qu’aurais-je à te pardonner ?

Des mots que tu as dits sans savoir.

Sans savoir, point de faute.

Oui, mais cette maladresse nuit à notre amour,

Un instant sans doute je n’étais plus cet ami.

Un instant sans doute je t’ai trahi.

Si dans cette amitié tu pouvais trahir,

Ce serait le signe qu’avant toi je me suis égaré

Car dans cette confiance que j’ai nourrie,

Toutes tes fautes par avance sont lavées.

Plume d’Éveil – De la relation (6)

– C’est un adulte triomphant, qui sait, qui dit, un guerrier qui est dans une assurance totale, dans une maîtrise parfaite sans faille.

Ah, là, le bât blesse !

Maîtrise parfaite !

Je la connais bien celle-là, je l’ai côtoyée toute ma vie, pas du dedans, je n’ai jamais rien maîtrisé, c’est sûr, et même qu’à chaque fois que j’ai cru y être, un événement extérieur est venu tout foutre par terre en me disant…

 

– Ah Michelle, je comprends que tu le sentes comme cela, je sais ce qui en moi te le suggère, mais je te promets que non, je ne me sens la maîtrise de rien, et je ne pense pas savoir grand-chose, je ne te fais pas de la modestie là hein ? Comment pourrai-je considérer que je sais beaucoup de choses ? Le ton de ma voix produit cet effet mais il ne correspond pas à celui d’une personne sûre de son savoir.

Je suis un être double Michelle, je ne sais jamais si je dois répondre oui ou non, parce que les deux réponses n’ont pas de texture différente pour mes sens, c’est une infirmité, ce n’est pas un bagage de connaissance, comprends-tu ? Une infirmité qui doit sembler si étrange aux autres pour les pousser à m’interroger. C’est encore un drôle de paradoxe, je n’aspire qu’au silence et recueillement, à la solitude dans la grotte, et me voilà à tourner la tête à droite et à gauche sur un rythme de rock. (Sourire).

Mon amie, ce que nous vivons dans la relation aux choses en dehors de la présence des pensées identifiantes n’est que sensations, donc expérience du corps, y ramener ensuite la pensée pour chercher à identifier ces sensations, les signifier, correspond à parler du doigt qui montre la lune et non de la lune. Ne crois-tu pas ?

J’ai un effaceur si puissant que 99,5 % de ce qui se passe est mis à la corbeille, parfois je ne me souviens de presque rien.

Je sais que j’ai tissé, qu’on m’a parlé, j’ai eu de la visite, toute la journée des allées venues, je ne me souviens à peine de qui, de quoi, qu’a-t-on pu me dire.

C’est parce que je n’écoute plus les hommes, voilà dans quel état tu me trouves.

Je suis comme un gorille en cage dont le regard ne s’arrête ou ne suit aucun objet extérieur, un regard perdu au loin vers une savane imaginaire et perdue.

Je quittais ce monde doucement, en gorille sauvage que je suis, leurs bruits et préoccupations, leurs chansons, et soucis me sont devenus étrangers, là je te parle de moi hein… Il me semble que c’est ce qui compte ce que je te raconte là.

J’ai eu des professeurs et j’ai appris à parler d’autres langues que les leurs, à regarder avec l’œil qui se perd.

Tu es entrée dans ma maison lorsque je m’échappais par la porte de derrière, tu m’as saisi par le bras en me disant reste un peu encore Ron, et je me suis assis là à t’écouter parler, effaré par ta production, maintenant tu me demandes de parler de ce qui habite l’instant où le soleil rouge plonge en moi…